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Partout, elle a emmené dans ses bagages les valeurs de la gastronomie périgourdine : authentique et au goût du jour car issue d’une agriculture paysanne. Au-delà du simple titre de « cuisinière de Mitterrand », comme le dit Cyrano dans la tirade des nez, « on pouvait dire, ô Dieu, bien des choses… » : Pionnière de l’agro-tourisme (avant l’existence de ce terme et la notion de circuits courts) avec la création des « week-ends foie gras à la ferme », cuisinière de l’extrême pendant quatorze mois en Antarctique dans une base scientifique, conseillère en Nouvelle-Zélande pour la plantation de truffières…

En ce mois d’octobre, le téléphone sonne à La Borderie, la ferme familiale en Périgord noir. Une invitation d’un producteur de télévision pour témoigner sur Julia Child, célèbre chroniqueuse qui a promu la cuisine française aux États-Unis, et que notre hôtesse a côtoyé lors de trois années passées outre-Atlantique. Encore une expérience dans cette vie trépidante ! Le port altier, la pommette haute, le regard vert noisette pétillant rendu plus intense par de fines rides d’expression… Elle a une sacrée présence, Madame Mazet-Delpeuch. Et quand elle commence à parler, la voix douce mais ferme vous conforte sur sa capacité à partager et transmettre sa passion. Sans dédaigner l’honneur d’avoir été choisie pour les fourneaux élyséens elle en garde surtout le souvenir d’une expérience humaine exceptionnelle Les arrières-cuisines du pouvoir exécutif s’avèrent une école de la vie très formatrice
« Le métier de cuisinière n’est qu’un passeport pour aller à la rencontre des autres ».

Danièle résume d’un geste de la main : « Vraiment, il n’y a pas de quoi en faire un plat, ce n’était pas si difficile que cela ». D’autres aventures ont très vite happé cette femme éprise de liberté. Amateurs d’anecdotes, passez votre chemin ou allez voir ou revoir « Les saveurs du palais », adapté de son autobiographie, devenu un classique maintes fois rediffusé. Son rôle y est interprété par une Catherine Frot délicieuse, avec Jean d’Ormesson dans celui de François Mitterrand. Excusez du peu !

 
Le métier de cuisinière n’est qu’un passeport pour aller à la rencontre des autres

La base de la gastronomie, pour elle, se situe au carrefour de la cuisine paysanne et bourgeoise. Qu’il s’agisse du produit le plus humble ou du plus mythique, c’est le tour de main qui en magnifie les saveurs. Elle voue passion et respect pour la truffe et le foie gras (d’oie surtout), compagnons de route de toujours. Mais le véritable génie puise son origine à la limite de la pauvreté et appartient aux cuisinières qui ont su bonifier les ingrédients à la « fortune du pot ». Ce côté magique d’un tourin, où de l’ail, du blanc d’œuf, de l’eau et une « tombée » de graisse d’oie se font divin velouté par la magie d’un savoir-faire qui se transmet comme un héritage. « Il y a autant de recettes de tourin que de cuisinières en Périgord » dit-elle.

Jury au Prix Ragueneau 2019

Ses dernières explorations : le vin, avec de multiples incursions dans le vignoble bergeracois où son expertise du goût est sollicitée lors des concours (Prix Ragueneau ou encore Concours des crus de Monbazillac). Elle s’émerveille sur les veines de silex apparentes dans le chai souterrain des Verdots ou l’art d’élever de belles cuvées en amphores au Château Tour des Gendres. Un nouveau champ infini de saveurs et d’alliances mets-vins s’ouvre pour cette insatiable curieuse des trésors venus de ce fabuleux terroir périgourdin.

 

Texte Marie-Pierre Tamagnon

Photo Akim Benbrahim

Ma cuisine du Périgord à l'Élysée, Éditions Bayard 17€

7 février 2020 à 15 h 47 min
jean salkazanov

Magnifique éloge. Du vrai journalisme

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